L’histoire vraie d’une chaîne de fraternité ayant permis le sauvetage d’un ex déporté promis à la mort devient, dans la mise en scène de Mathieu Coblentz, un spectacle polyphonique. L’Enfer de Treblinka de Vassili Grossman pose l’horreur du XXe siècle en fond historique du destin particulier de Robert Antelme. Sur cette toile saisissante se détachent le récit de Dionys Mascolo, qui raconte l’extraordinaire évasion de son ami dans Autour d’un effort de mémoire ; et celui de Marguerite Duras qui, dans La Douleur, raconte l’attente puis les soins prodigués à son mari ravi à la mort. Une ode à l’humanité.
En avril 1945, le résistant Robert Antelme, extrêmement affaibli et sous quarantaine au camp de Dachau, fut exfiltré et ainsi sauvé grâce à la ténacité de ses amis. Deux ans plus tard, il publia L’Espèce humaine, livre majeur sur l’expérience de la déportation. Pour chanter cette épopée d’un revenant, Mathieu Coblentz fait dialoguer la voix de l’écrivain avec celle de deux de ses proches, acteurs de son sauvetage : son épouse, Marguerite Duras, autrice d’un magnifique journal de l’attente intitulé La Douleur, et l’ami du couple Dionys Mascolo, qui livra à son tour son témoignage dans Autour d’un effort de mémoire.
Trois comédiens portent ces récits croisés avec le concours de deux musiciens. Ils occupent quatre espaces scéniques superposés. Les différents lieux et points de vue de la narration se rejoignent à travers la ferveur du jeu. Les fragments du Requiem de Mozart donnent à ce retour de l’enfer la dimension d’un mythe universel.